A l'occasion de l'examen du projet de loi visant à encadrer le crédit à la consommation,
Frédérique MASSAT est intervenue dans la discussion générale.
Retrouvez ci-dessous l'intervention qu'elle a prononcée lors de la séance de nuit du 24 mars 2010:
Madame la ministre
Scandalisée,
qualifiant de mensongères et harcelantes les publicités du crédit à la consommation,
jugeant que le crédit est un tunnel au bout duquel on ne sort jamais,
Vous n'avez pas de mots assez forts pour dénoncer le crédit à la consommation et ses pratiques commerciales.
Et Pourtant, à la force de vos propos, nous sommes contraints d'opposer la trop grande faiblesse de votre texte sur de nombreux points.
La transposition de la directive européenne du 23 avril 2008 a introduit un certain nombre d' avancées notamment en terme de protection du consommateur.
Cependant comme nos collègues l'ont précédemment fait au Sénat, nous considérons qu'il appartient au législateur national d'aller plus loin pour encadrer le crédit à la consommation et protéger nos concitoyens des pratiques abusives pratiquées par ces organismes de crédit.
En effet, chacun s'accorde à reconnaître la dangereuse spirale du surendettement dont nul n'est à l'abri.
Si l'unanimité est de mise pour décrire ce mal, on ne peut néanmoins que déplorer l'absence d'outils préventifs au surendettement et au mal endettement.
Votre rapport revient très justement sur les causes qui conduisent à ces situations:
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la survalorisation de la consommation immédiate et impulsive (n'oublions pas que c'est votre majorité avec des textes comme le travail du dimanche qui vante cet idéal de vie),
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l'agressivité des organismes de prêts,
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les accidents de la vie
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MAIS surtout, la perte de pouvoir d'achat.
Les causes sont donc multiples.
Et ainsi d' un incident de manque de liquidité ponctuel, rapide est l'escalade vers le surendettement.
Il est donc impératif de travailler à la mise en place de moyens et d'outils permettant de venir concrètement en aide à ces personnes et de les protéger avant que leur situation ne dérape véritablement.
Autre grande absente de ce texte, l'action de groupe.
En commission, lorsque je vous ai interrogé à ce sujet, vous m'avez répondu que ce n'était pas l'objet de ce projet de loi.
Pas le moment, pas le sujet, c'est la sempiternelle réponse que votre gouvernement nous fait depuis des années.
Sans revenir aux calendes grecques , je voudrais tout de même rappeler qu'en 2008 alors que nous examinions la loi de modernisation de l'économie, le ministre de l'époque, Luc Chatel avait annoncé qu'un texte serait présenté avant la fin de l'année.
Nous sommes en 2010 et toujours pas l'ombre d'un projet de loi.
En attendant, la complexité et le cout des procédures dissuadent nos concitoyens d'attaquer ces organismes de prêts dont nous reconnaissons tous que les méthodes sont répréhensibles.
La mise en place de l'action de groupe participerait donc à l'encadrement de ces pratiques.
Pratiques abusives que l'on retrouve également du côté des établissements bancaires épinglés en septembre dernier par un rapport de la Commission européenne sur le niveau élevé des frais qu'ils pratiquaient mais aussi pour leur opacité.
Ainsi, vous avez annoncé Madame la Ministre, entre les deux tours des élections régionales, vouloir traquer ces abus notamment à travers une nouvelle mesure introduite dans ce projet de loi visant à supprimer les pénalités libératoires.
Si cela s'inscrit dans le bon sens, il ne faudrait pas que cette décision de votre part occulte le reste, c'est-à-dire tout le volet traitant du crédit revolving.
Ainsi, je voudrais insister, à l'instar de mes collègues, sur l'absence de cohérence entre vos discours et vos actes.
N'est-il pas aberrant de dénoncer avec autant de véhémence le crédit rechargeable sans pour autant en annoncer la suppression?
A cela, vous nous répondez que votre proposition de loi prévoit de l'encadrer mais nous considérons que cet encadrement n'est pas assez sévère.
Il faut aller plus loin en prévoyant par exemple une vérification régulière de la solvabilité de l'emprunteur mais aussi en interdisant la possibilité d'effectuer des retraits ou des paiements sous forme de crédit rechargeable.
En effet ces derniers mois on a vu apparaître des cartes bancaires offrant au consommateur la possibilité de choisir au moment du paiement entre un paiement comptant ou à crédit, véritable piège pour le consommateur et véritable effet d'aubaine pour les banques.
Par ailleurs, il faut élargir l'offre de crédit.
En effet de récentes enquêtes sur la distribution de crédit ont permis de mettre en exergue certaines pratiques des organismes bancaires ou de crédit.
En effet, en dessous d'un seuil plancher avoisinant les 3000 € (ce qui est relativement élevé), ces organismes ne proposent que du crédit rechargeable au détriment du prêt personnel.
En conclusion , mme la Ministre, ce texte propose des avancées mais aucune réforme structurante.
Nous avons l'opportunité de mettre un terme à des pratiques abusives dont les conséquences sont souvent dramatiques pour certains de nos concitoyens.
J'espère que les débats et l'examen des amendements nous permettrons d'aller plus loin dans la protection du consommateur qui aujourd'hui + qu'hier s'affiche en impérieuse nécessité.